Le 19e siècle et notamment sa seconde moitié est un ferment d’innovations dans les domaines scientifique et technologique, artistique et culturel, économique et politique.
Il a fallu 70 ans, le temps d’un consulat, une république, trois monarchies et deux empires pour que ce siècle enfante la troisième république, et la gestation de l’école laïque a duré plus encore, comme le décrit l’excellent article très documenté de Solange Krnel-Carranante.
Sans doute fallait-il cette lenteur pour surmonter les résistances, braver les oppositions, résoudre les tensions qu’ont suscitées, tant dans la société civile que politique, le principe de laïcité et l’instauration de l’École de la République, celle qui pose les bases d’une égalité démocratique de tout enfant, de quelque origine soit-il, devant le droit au savoir et l’accès à la connaissance.
Quelle délicate transition en effet pour passer de la toute puissante influence de l’église, aussi bien en politique que dans une éducation inégalitaire, au rôle démocratique de l’école.
Déjà le représentant du culte (la foi) voit son omnipotence rognée progressivement par la notoriété du médecin (la science) qui règne sur les corps et bientôt sur les âmes ; alors perdre la conduite des esprits au profit de maîtres d’école, pensez un peu…
C’est donc pied à pied que le parti de l’église comme celui de l’égalité républicaine avancent ou reculent sur plusieurs décennies, malgré l’implantation grandissante des « hussards noirs », et l’influence d’écrivains tels que V. Hugo ou E. Zola. C’est sous l’impulsion d’un Eurois, Aristide Briand, qu’en décembre 1905 l’État se sépare des églises, assurant à chaque citoyen la liberté de conscience, l’égalité devant l’accès à l’instruction, la culture et la formation professionnelle, facteurs d’émancipation, de respect mutuel et de fraternité entre toutes.
Depuis lors, malgré quelques soubresauts, notre école laïque offre à chaque individu un socle commun depuis lequel nous pouvons découvrir ce qui nous relie et les valeurs que nous partageons.
François Crevel
Honoraire du corps d’inspection de l’Éducation nationale