L' abbaye Saint Nicolas

Visite privative du 28 septembre 2024
C’est par une matinée d’automne que tous les membres participant à cette sortie se sont retrouvés face à l’abbaye Saint Nicolas de Verneuil-sur-Avre en compagnie de Denis LEPLA et Pierre DURANT (AMSE) nos deux guides, afin d’effectuer une visite privative de la ville.
Compte tenu du nombre important de participants c’est après avoir scindé le groupe en deux que notre guide, qui nous dit se prénommer Hortense, nous entraine dans le cloître au sein de l’abbaye Saint Nicolas pour nous exposer l’histoire du site. Nous ayant rappelé la genèse de la ville, elle nous narre l’évolution du site, de son origine jusqu’à nos jours, sans oublier de nous évoquer les grands moments et tous les personnages ou personnalités qui ont illustrés cet historique.
Les prémices de l’abbaye Saint-Nicolas apparaissent dès le début du 11e siècle alors que Henri Ier Beauclerc, fils de Guillaume le Conquérant, duc de Normandie et roi d’Angleterre entreprend la construction de la cité médiévale de Verneuil . Dès 1120 la construction d’un prieuré est entreprise et une fondation est née avec l’installation des premiers moines en 1122.
Ce n’est qu’en 1617 alors que le baron Rouxel de Médavy, gouverneur de Verneuil meurt, que sa femme, Charlotte de Hautemer, initie, en accord avec Mgr Péricard, évêque d’Evreux, le projet de fondation d’une abbaye à Verneuil. En 1623, Charlotte de Hautemer achète les terrains et les maisons aux habitants de la paroisse afin d’y installer une communauté de religieuses.
Celle-ci est fondée en avril 1627 sous le patronyme de Saint Nicolas et placée sous la direction de la sixième des dix enfants de la comtesse, damme, Guyonne Scholastique de Médavy. Mais il faut attendre un an avant que l’évêque ne donne aux moniales l’église Saint Nicolas, le cimetière et le presbytère. La première pierre du prieuré est posée le 6 décembre 1628, en la fête de St Nicolas, les murailles du dortoir furent prêtes à accueillir les religieuses en clôture mais l’aile Ouest ne sera achevée qu’en 1631. Le prieuré est érigé en abbaye royale par lettre patente du roi de France Louis XIII à cette date. La seconde aile ne sera terminée qu’en 1635 mais dès cet instant le monastère adopte la règle, très stricte, de Saint Benoît. Auprès de l’église des XIIème et XVIème siècles, les bâtiments monastiques du XVIIème et le cloître sont toujours entourés d’un écrin de verdure. Au sud, toujours visibles depuis les fossés, subsistent les remparts de la ville médiévale et la porte d’Armentière utilisés comme mur de clôture par les bénédictines (voir implantation).
Jusqu’à la révolution l’abbaye conserve son aspect originel. Seuls les bâtiments conventuels et le logis de l’abbé font l’objet d’une reconstruction dans les années 1720-1730. Le seul changement dans les institutions réside dans le fait qu’en 1737, les religieuses de l’abbaye Notre-Dame-de-l’Annonciation de Pacy quittent leur abbaye et rejoignent les moniales. Elle comptera alors plus de 80 moniales jusqu’à la fin du XIXe siècle. Comme beaucoup d’édifice religieux l’abbaye est victime de la révolution. Elle et en partie détruite. L’église, le cloître ou nous nous trouvons et les autres constructions servent dès lors de caserne, de grenier d’abondance, d’hôpital et d’asile.
L’abbaye renaît en 1825 avec le retour des moniales. L’évêque d’Evreux, Pair de France, Charles-Louis Salmon Chatellier désirant faciliter la vie des religieuses de l’abbaye, se résout de remettre vigueur leur ancienne constitution en y apportant toutes les modifications que les temps et les localités exigent. Il promulgue et fait éditer une nouvelle constitution de l’abbaye. Les moniales font construire un nouveau bâtiment servant de pensionnat financé par le marquis de Montmorency et la Duchesse de Richelieu. Jusqu’au XIXe et XXe siècle durant lesquels les lieux seront occupés par une maison de retraite, labbaye devient la maison mère de la Congrégation Notre Dame de Charité du Bon-Pasteur fondée par Sainte Euphrasie Pelletier. 
Dès 1947 l’abbaye devient célèbre pour sa biscuiterie dont les nonnettes se vendront jusqu’en 1995.
Les dernières moniales, qui n’étaient que sept dont une de 102 ans, quittent l’abbaye en 2001 pour rejoindre l’abbaye de Notre Dame du pré à Valmont. L’abbaye est alors confiée à la communauté « Pain de Vie » avec pour mission de poursuivre en ces lieux la vie de prière, de travail et d’accueil. En avril 2007, Mgr Nourrichard, tout juste arrivé dans le diocèse demande à la communauté de quitter les lieux. Mais celle-ci refusent et font demande de rachat qui restera vaine jusqu’en 2009 date à laquelle l’abbaye est finalement rachetée par la communauté de communes avec la volonté de donner au site un caractère culturel. Après des études archéologiques effectuées en 2019, des bénévoles et des entreprises, soutenus par des mécènes, œuvrent sur les remparts qui bordent le site tandis que d’autres interviennent à entretenir l’intérieur des bâtiments. A la même époque entre 2019 et 2020, le jardin médiéval du cloître est restitué. Afin de poursuivre cette entreprise, depuis 2021, des expositions sont organisées, des visites théâtralisées programmées pour faire vivre le lieu.
Salle du chapitre
Le réfectoire
  • La pièce dites de récréation où les moniales peuvent se réunir en petit groupe pour faire des activités de loisir (couture, broderie, etc.) sous l’autorité d’une d’entre elles mais toujours selon la règle de Saint Benoît sans parler sauf à la nécessité liée à l’activité.
  • la salle capitulaire ou du chapitre est la pièce la plus importante de l’abbaye. C’est là que tous les membres de la communauté sont convoqués tous les jours autour de l’abbesse par une cloche (au-dessus du bâtiment), afin de lire et commenter un chapitre de la règle de Saint Benoit et de régler toutes les affaires touchant l’organisation matérielle de l‘abbaye notamment l’affectation du rôle de chaque moniale pour une période donnée.
  • Le réfectoire autre lieu symbolique où les moniales se rassemblent pour prendre leur repas en silence sous l’égide de l’abbesse. Hortense nous fait remarquer l’estrade où déjeune l’abbesse et au milieu de la pièce la chaire où une moniale fait la lecture des écritures pendant que les autre mangent. Bien que l’ensemble du mobilier soit disparu, nous distinguons au sol les trous qui maintenaient les tables disposées sur les deux niveaux d’estrade qui longent de part et d’autre la pièce.
  • La bibliothèque, une vaste pièce équipée de rayonnages du sol au plafond dans lesquels figuraient des centaines d’ouvrages aujourd’hui disparus suite au départ des moniales et à la dispersion des biens.
  • et bien d’autres pièces qui rendent compte de l’austérité du quotidien des bénédictines.
Notre visite au rez-de-chaussée terminée nous empruntons un petit escalier qui mène au parloir de l’abbesse. Au passage nous remarquons une porte dont on nous explique que c’est par là que les visiteurs entraient, un à un, accueilli par une « portière ». Cette dernière étant en charge de s’assurer que le visiteur n’ait aucun contact avec une autre religieuse que celle demandée, de vérifier l’acceptation de la visite par la mère supérieure ainsi que les objets ou correspondances qu’ils portaient avec eux.
Vue des murs, détail du plafond et une des peinture du parloir de l’abbesse
A l’étage nous découvrons les parloirs : celui des moniales et celui de l’Abbesse. Ce sont des lieux particulièrement étonnants et émouvants. L’un et l’autre sont constitués d’une grande pièce divisée en deux parties distinctes par un muret surmonté d’une grille qui empêche tout contact avec les religieuses. Dans le parloir des moniales la séparation à disparue mais on remarque facilement le partage par une différence notoire au sol : ciré côté des visiteurs et nature ou dénaturé du côté des moniales. En contrepartie, le parloir de l’Abbesse totalement restauré entre 2021 et 2023 et ouvert au public en 2024, est une pièce remarquable. Les murs et le plafond de la zone des visiteurs sont intégralement couverts de 92 décors de caissons peint du XVIIe siècle   représentant une scène paysagère réelle ou imaginaire. Réalisés par les nonnes ils constituent une composition rare et unique dont la restauration a été confié à des ateliers spécialisés en Normandie. La clôture qui sépare les deux pièces est formée par un mur percé de trois ouvertures closes par des grilles : une au centre pour l’Abbesse et une autre de chaque côté pour deux moniales. Au travers des grilles nous pouvons apercevoir le siège de l’Abbesse et une décoration aussi luxueuse que celle du parloir mais encore en attente de restauration.
Ayant quitté le parloir nous redescendons par le même escalier en direction de la chapelle mais juste avant d’arriver nous empruntons un étroit couloir avec quelques marches qui nous mène dans la crypte. C’est une longue salle voûtée et dallée de carreaux en céramique.
Autel de la crypte
Vitrail au fond de la Cryptre 
Sur notre droite se dresse l’autel avec de part et d’autre deux dalles funéraires dissimulant les tombeaux des premières moniales. Sur l’une d‘elle nous pouvons lire Charlotte de Hautemer et Guyonne Scholastique de Médavy.
Au fond de la crypte nous percevons un petit escalier, assez raide, qui monte sous un passage voûté tout en brique.
Tout en haut au-dessus du palier nous percevons un vitrail rond représentant la descente de la croix.
Notre guide nous explique que cette crypte a été entièrement remplie de pierres en 1793 lors de la révolution (période ou le culte catholique est remplacé par un culte officiel dit de la raison) et que ce n’est qu’à partir de 1802 (moment du rétablissement des cultes reconnus par Napoléon III) que la crypte à recouvert je jour. Fort de ces précisions nous remontons au rez-de-chaussée pour terminer notre visite de l’abbaye par l’église Saint Nicolas qui figure juste au-dessus de la crypte.
Choeur de l'église Saint Benoît
Pierre tombale de Sainte Hautemer
Les lieux sont vastes et d’une clarté surprenante amplifiée par une restauration récente du chœur en croisée d’ogives. Il est éclairé par de hautes baies renaissance dotées de vitraux lumineux. Quelques sculptures se détachent sur les parois lisses du pourtour du chœur.
La sobriété et solennité de la nef sont accentuées par la présence de chaque côté, de deux rangées de stalles en bois.  Tout au fond trône, sur le troisième niveau d’une estrade à trois gradins, le siège de l’Abbesse drapé de rouge et, de part et d’autre sur le niveau inférieur le siège de deux moniales.
Unes des sculture de l'église
Vue de la nef de l'église
En partie haute, un balcon de bois souligne une large alcôve dans laquelle Hortense nous informe qu’il y figurait jadis les orgues.
Notre visite de l’abbaye étant achevée, nous quittons les lieux et poursuivons notre découverte de Verneuil en nous rendant, à quelques pas, à l’église Notre Dame.
 
 
Poursuivre en lisant le résumé de la suite de notre visite : l’Eglise Notre Dame